EXCURSION
De la société archéologique, historique et scientifique de Soissons,
A Mons en Laonnois et ses environs
Dans sa séance du lundi 6 mars 1873, la Société archéologique, historique et scientifique de Soissons avait décidé que le but de son excursion de cette année, serait la commune de Mons en Laonnois et ses environs, qui se recommandent autant par la variété des sites que par les .édifices remarquables qu'on y rencontre et les souvenirs qui s'y rattachent.'1'out en nous entretenant des choses et des hommes d'autrefois, nous marchions vers le hameau des Creuttes eu franchissant une rampe profondément encaissée, bordée à droite et à gauche d'escarpements sablonneux surmontés de touffes de ronces et de clématites qui, confondant leurs feuillages, formaient au-dessus de nos têtes une voûte de verdure et de fleurs.
Arrivés bientôt au sommet, un panorama splendide se développait sous nos yeux. Devant nous une plaine immense s'étendait par-delà les grands bois de Lavergny et de Samoussy, vers l'Ardenne et la Champagne, jusqu'aux limites de l'horizon que l'œil incertain confendait avec le ciel. Du milieu de cette étendue, pour ainsi dire sans limite, la montagne de Laon, isolée de toute part, s'élevait comme une ile du sein des flots et laissait briller au soleil les flèches de ses églises et les tours de ses remparts.
A nos pieds. perdues au fond d'une crique de ce vaste espace, de cette mer sans eau, si je puis m'exprimer ainsi, se groupaient les maisons de Mons-en-Laonnois, dont les toits de tuiles et d'ardoises tranchaient avec vigueur sur le vert foncé des jardins et des vergers, tandis que tout autour des rampes adouoies, couvertes de vignobles, s'élevaient semblables à un large amphithéâtre, jusqu’aux roches calcaires qui le couronnent et forment son pourtour. C'est à des habitations creusées dans la partie inférieure et tendre de ces roches que le village des Creuttes doit son origine et son nom. Ces habitations souterraines, qui n'étaient dans le principe que de simples grottes, furent très probablement les abris des premières populations du pays, alors, qu'encore sauvages, elles n'avaient pour armes que le silex, pour industrie que la chasse et la pêche, et pour religion que le culte des éléments. Peu à. peu ces simples demeures s'agrandirent. se divisèrent en plusieurs chambres ou compartiments, et sous l’action d'une civilisation lente mais progressive, finirent par être abandonnées ; elles ne servent plus, à quelques exceptions près, qu’à des usages ruraux et sont aujourd'hui remplacées par des maisons plus saines et plus commodes.
Des titres ecclésiastiques du XII siècle nous montrent qu'à cette époque le village des Creuttes avait son grand bailly, son maire et ses échevins et qu'il relevait pour la seigneurie, de la trésorerie de l'abbaye de St Vincent de Laon. La charité y avait dejà créé une maladrerie, et une église dédiée à saint Martin s'était élevée sur l’emplacement même de la fontaine qui servait aux besoins des habitants et qui sans doute avait été dans les temps éloignés l’objet de leur culte. La religion chrétienne plaçait ainsi souvent les fontaines, les rochers et les bois sous la protection des bienheureux du ciel, afin de détruire d’anciennes superstitions, sans trop heurter les préjugés du temps. On voit encore aujourd'hui les eaux de la source sortir d'une voûte pratiquée entre les débris de deux contreforts, seuls vestiges restant de l’ancienne église détruite pendant la Révolution.
C’est aussi vers cette époque que le village des Creuttes perdit son autonomie, par suite de sa réunion avec Mons-en-Laonnois dont il devint une dépendance. Malgré tout l'attrait des Creuttes, malgré le spectacle grandiose dont nos yeux avaient peine à se détacher, un motif puissant et à la fois bien prosaïque nous attirait vers le bourg de Mons-en-Laonnois qui se déroulait à nos pieds . c'était la perspective d'une réfection qui nous y attendait et que nos estomacs, à jeun depuis le malin, réclamaient avec instance. Bientôt assis autour d'une table modestement servie, nous nous reposions de nos fatigues dans un repas assaisonné par l'appétit et animé par la gaîté. Mais il n'y avait pas de temps à perdre si nous voulions remplir jusqu'au bout le programme que nous nous étions imposé. A peine avions- nous consacré une heure à un repas si bien gagné que nous nous remettions en campagne pour visiter Mons-en-Laonnois.
C'est une jolie bourgade qui se présente avec une certaine apparence urbaine. Grâce à ses rues pavées, a ses maisons bien bâties, souvent élégantes et parmi lesquelles on remarque particulièrement l'habitation de M. de St-Léger, accompagnée de vastes jardins et à laquelle des tourelles d'une construction récente donnent l'aspect d'un château du XVI siècle.
Sans remonter à la hante antiquité du village des Creuttes, Mons-en-Laonnois peut aussi revendiquer une origine fort reculée. Si de nombreuses médailles romaines trouvées sur son territoire nous montrent qu'il fut occupé par les conquérants de la Gaule, le séjour prolongé des hommes du Nord qui vinrent enlever aux Romains cette belle province, y est aussi attesté par la présence d'une nécropole remarquable située au midi, près des dernières maisons du village, sur la gauche du chemin de Vaucelles ou elle forme un tertre sablonneux recouvert de bois. M. le vicomte de Courval, qui y a pratiqué quelques fouilles il y a 25 ans, en a extrait des armes, des ustensiles et des bijoux, et en même temps que des vases se rapprochant, par leurs formes, de la céramique romaine. De grands sarcophages en pierre dont les couvercles sont ornés de la croix latine, semblent indiquer que cette sépulture fut en usage Jusqu’à l’époque chrétienne.
L'existence de ce cimetière franc, confirme en quelque sorte ce que l’histoire nous fait connaitre, en nous disant que le village de Mons-en-Laonnois fut , sur la demande d'AttiIa, 7° évêque de Laon, donné par le roi Clovis II, en 653 à son évéché qui l'a toujours conservé depuis.
C'est en ce lieu que se retira l`évêque Adalberon, si connu par ses écrits; ses qualités, ses défauts et ses malheurs et qui, brouillé avec la Cour, avait été expulsé de son siège en 981 par le roi Louis V.
En 1134, le grand évêque Barthélemy donna la cure de la paroisse à l'abbaye de St-Vincent. Quelques années- plus tard il fît don des dîmes au même monastère, se réservant *seulement les droits seigneuriaux.
Jusqu'en 1174, les habitants de Mons-en-Laonnois, comme ceux d Amzy et de douze ou quinze autres villages dépendant du domaine de l’évêché, n'avaient pas encore participé au mouvement d'affranchissement communal qui remua si profondément le pays dans les premières années du XIIème siècle. En 1174, profitant de la vacance du siégé épiscopal survenu à la mort de Gauthier de Mortagne, ils offrirent au roi Louis Vil une somme d'argent considérable et en obtinrent une charte d’affranchissement calquée sur celle de Laon. Roger de Rozoy, qui fut peu de temps après promu à l'évêché de Laon, vit avec peine cette institution nouvelle et essaya d’en obtenir la suppression. N'ayant pu y parvenir, il résolut d'employer la force ; il leva des troupes, et, aidé de son frère, Renaud de Rozoy, de Jacob d'Avesne et du comte de Rethel, son parent, il attaqua les habitants des communes confédérées qui furent écrasés et dispersés.
Le roi accourut alors pour punir le prélat qui osait briser si violemment une institution placée sous sa sauvegarde; il enleva à Renaud de Rozoy son château de Nizy-le-Comte et se saisit du temporel de l'évêque de Laon qui fut obligé de chercher un refuge, d'abord chez le comte de Hainaut, puis auprès du pape. Mais quelques années après, le roi Philippe-Auguste à La sollicitation du clergé, abolit définitivement la commune du Laonnois, et le village de Mons ne recouvra ses libertés communales qu'en 1235, sous l’épiscopat d'Anselme Mauny.
Dès l'année 1105, Mons-en-Laonnois était le chef-lieu d'une prévôté importante dont les appels ressortissaient directement du duché de Laon, et en 1130, cinq ans avant Ie rétablissement de la commune, Anselme Mauny en avait fait le chef-lieu d'un doyenné qui comprenait trente et une paroisses; une abbaye chef d'ordre, Prémontré, _et un prieuré, St-Lambert qui dépendait de St-Crépin-en-Chaye. En 1330, Albert de Roye, 60° évêque de Laon. y tint un synode où furent réglés divers intérêts de son diocèse.
Comme la plupart des villes et des bourgades de nos contrées, Mons-en-Laonnois a eu souvent à supporter les malheurs de la guerre. En 1373, les Anglais le livrèrent au pillage et aux flammes, sans épargner l'église. La misère des habitants fut alors si grande que cinq ans après ils n’avaient pu encore réparer leurs désastres et que le roi Charles V, par une ordonnance datée de Vincennes, le 12 juillet 1378, dût leur accorder une exemption de contribution pendant plusieurs années. Il éprouva à peu près le même sort en 1437, pendant que les factions d'0rléans et de Bourgogne déchiraient le royaume. Les guerres des impériaux, sous François premier, lui furent également fatales, ainsi que les guerres civiles, sous Charles IX. On rapporte que ce prince se trouvant, en 1562, à Mons-en-Laonnois, chez un personnage important nommé Jésus, y courut risque de la vie, par suite de la chutte du plancher de la chambre dans laquelle il se trouvait. Quelques historiens out placé le théâtre de cet événement au château de Moy, mais le registre des comptes de la ville de Laon, pour l’année 1562, en constatant la présence de la Cour à Mons-en-Laonnois dans le cours de cette même année, ne laisse aucun doute à cet égard. Nous y lisons en effet à la date de 1562 : « Dépense de 11 livres 3 sols 6 deniers tournois faicte par Antoine de Marie, receveur, pour 40 pots et 8 pintos de vin blanc présentes au roy Charles IX et à la royne, au roy de Navarre et autres grands seigneurs estans au village de Mons-en-Laonnois. »
Mons-en-Laonnois eut aussi à souffrir pendant la guerre de la ligue, particulièrement en 1590. En cette dernière année, dit Antoine Richard, dans ses mémoires, p. 239,4: les paysans du village s'estanz fortifiez dans leur église qu'ils avoient accomodé de canonnières es endroictz où il sembloit nécessaire, avec une sainture de muraille garnie de petites tourelles qui la flanquoient, prindre les armes, disoient n'être que pour la conservation de leurs personnes et moiens allencontre des coureurs et estrangers ; toutesfois en favorisant le party de la ligue destroussoient souvent près leur village plusieurs realistes passans, chose qui parvint à la cognoissance de ceulx de Crépy, ainsi que aulcuns d'eux y avoient esté mal traictez par ces paisans qui commectoient ces pilleries environ quelque demie líeue-arrière de leur villaige pour faindre que c'estoit ceulx de la garnison de Laon, occasion que le XXIIlI° jour de ce mois de febvrier, ceuh de Crespy s'en allèrent de nuict se jeeter dedans ce villaige de Mons-en-Laonnois, où nonobstant les barrières, baricades, gardes et sentinelles pozées, les paisans furent forcez et les mutins de la dedans (en assez bon nombre) bien estrillez comme ils méritoient. »
Mons-en-Laonnois, privé de son doyenné par la Révolution, fut désigné en 1790 comme chef-lieu d'une justice de paix. Malheureusement le tribunal qui lui rappelait si vaguement son ancienne juridiction prévotale, fut supprimé au moment de la réorganisation judiciaire en l800,et le bourg dut se résigner à demeurer dans les conditions d'une simple commune rurale, que son heureuse situation et le charme de ses environs rangent au nombre des résidences les plus agréables du canton et dont la belle église peut être enviée par plus d'une ville importante. Construite vers la fin du XIIème siècle, dans des proportions qu'atteignent peu d'églises de nos campagnes, elle s'élève sur le point culminant du village au milieu des habitations qu`elle surmonte, comme les cathédrales des grandes villes dominent de leurs masses les habitations pressées à leurs bases. Cette église éprouva de grands dommages pendant les invasions anglaises, particulièrement en 1373. Elle perdit alors son clocher, placé entre le chœur et la nef, son portail et deux travées de sa nef, dont les fondations furent mises a découvert il y a quelques années par des travaux exécutés à l’entrée du cimetière. La continuité des malheurs publics, le manque de ressources empêchèrent sans doute la réparation des désastres. Le clocher ne fut pas reconstruit; il en fut de même du portail et de la nef, on se contenta de fermer ce qui restait de cette dernière par une muraille surmontée d'un pignon triangulaire et appuyée sur deux contreforts. (Test dans cette clôture que la nouvelle porte de l'église fut ouverte et qu'on pratique. Une large fenêtre ogivale divisée dans sa hauteur par trois meneaux surmontés de rosaces dont le caractère assigne pour date de cette restauration le milieu du XIV ème siècle.
L’église de Mons-en-Laonnois éprouva de nouveaux dommages en 1558 et en 1590, et les époques désastreuses où la guerre était en quelque sorte à l'état permanent dans la contrée. Les habitants, comme nous l'avons vu, en avaient fait une forteresse dans laquelle ils se réfugiaient dans les moments de troubles. Une petite échauguette ou tourelle en encorbellement, placée sur un des angles du transept, du côté du nord, pour observer les abords de l'édifice et du village, porte la date de 1592.
Malgré ses mutilations, l'église de Mons-en-Laonnois présente encore un aspect imposant. On est frappé, en y entrant, de l’harmonie générale de son style, de l'ampleur de ses transepts et de ses trois nefs, de la grâce de sa triple abside demi-circulaire, dernier souvenir de l'abside romaine, de la légèreté de ses colonnes, de la hauteur de ses voûtes et de la multiplicité de ses fenêtres qui portent dans leurs parties supérieures tous les caractères de l’ogive primitive, c'est-à-dire de l'architecture du m° siècle.
On y remarquait autrefois de nombreuses pierres tumulaires qui ont disparu pour faire place à un dallage en pierres blanches, si en vogue aujourd'hui et si fatal au pavé historique de nos églises. La seule inscription lapidaire qui subsiste dans 1'intérieur est placée contre la muraille du transept méridional, près de l'ancienne chapelle de St Michel. C'est une pierre noire en grande partie martelée, sur laquelle on devine plutôt qu'on ne lit, au-dessous d'un personnage agenouillée, la fondation faite par messire Henry Carpetin, chanoine de Douay ou de Tournay, mort l'an mil quatre cent dix-sept et pour laquelle il donna à l'église des terres et des vignes situées en Brichou, ès Orgesoy, et en hault boisecourt, plus une masure sise lez la Motte des Clignes à Poilly.
Une autre inscription du même genre, en beaux caractères gothiques bien conservés, se trouve à. l'extérieur, à gauche de la perte d'entrée. Nous la reproduisons dans son entier, sans tenir compte de l'ancienne orthographe et des nombreuses abréviations qui en rendent la lecture assez difficile :
« Les marguilliers, paroissiens et habitans de....... ans, sont tenus et obligés de faire dire et célébrer à toujours perpétuellement en la dite église de céans, aux frais, dépens d'icelle fabrique, le premier jour de juillet ou autre jour prochain en suivant, si ledit premier jour était nécessairement empêché, un service solennel de vêpres et vigiles ii neuf psaumes et neuf leçons, messe et commendaces des trépassés, le tout à notes, par chacun an, par le curé ou chapellain de ladite église, avec lequel seront deux autres prêtres faisant diacre, sous-diacre et deux choristes, pour le salut et remède des âmes de feu Guillaume Douche et Pauline Dailly, sa femme, qui sont enterrés devant et assez près de ce présent portail, père et mère de honorable homme sire Jehan Douche, marchand bourgeois de Paris, et mettre pendant ledit service une bière couverte du poël pour servir de putation au devant du crucifiv, à l'entour d'icelle présentation quatre cierges chacun de demi-livre de cire qui arderont icelui service durant, en la tin duquel service lesdits prêtres iront sur la fosse desdits défunts dire et chanter le libera et les oraisons à ce pertinents et nécessaires, pendant lequel libera, service et les commendaces ils feront et seront tenus faire sonner les grosses cloches de ladite église. Et le dimanche précédent que on fera ledit service, faire annoncer par le curé ou chapellain dudit lieu au prône, ledit jour que devra être fait ledit service, et en la fin dudit prône dire un De Profundis et les oraisons à ce convenables et aussi faire sonner une heure entière à une lesse ou deux lesdites grosses cloches d'icelle église le jour précédent ledit service au soir. Et pour ce faire et pour l’entretennement et continuation de ce que dit est par chacun an, a été baillé par ledit sire Jehan Douche, bourgeois de Paris désirant le salut desdits défunts ses père et mère, une chasuble, une tunique, une dalmatique et trois chappes, le tout de damas vermeil et aussi orfroi de drap d'or de chappes où sont figures plusieurs histoires et personnages de -saint Pierre, saint Paul, saint Jean-baptiste et autres, comme tout ce appert et est plus à plain contenu et déclare ès lettres de ce faites et passées sous le scel du bailliage de Vermandois entre lesdits marguilliers, présents, plusieurs parroissiens de ladite église et de leur concentement nommés et dites lettres d'une part et ledit sire Jehan Douche qui a fait ladite fondation d'autre part, le troisième jour de juillet l'an mil IIIeIIIxxXIII. Et lesquelles choses ont été ratifiées par monseigneur l’oflicial de Laon, ainsi qu'il appert par lettres sur ce faites le vendredi cinquième jour dudit mois de juillet l'an dessus dit mil IIIIeIIIIxxXIII. »
Aprês avoir visité l'église, nous avions vu tout ce que Mons-en-Laonnois renfermait. d'intéressant au point de vue archéologique, il ne nous restait plus qu’à nous diriger vers le village de Chivy. La route serpente d'abord à travers des prés humides parsemés de touffes d’aulnes, puis bientôt elle s’engage dans de vastes terrains conquis en quelque sorte sur les marécages de l'Ardon et que l'industrie et les efforts des habitants ont convertis en de magnifiques jardins maraîcher, remarquables par la vigueur de leur végétation, l'abondance et la variété de leurs produits.
Projet de restauration de la butte Brunehaut
Avec le concours des communes de
Laniscourt
Mons en Laonnois
Bourguignon sous Montbavin
Et le syndicat d’initiative
Du canton d’Anizy Le Château
HISTORIQUE
La tombe de Brunehault a été prise en considération et nommée pour la première fois en l'an 1186 par un titre de l’Abbaye de Saint Vincent de LAON, en tant que point de repère. Et deux autres fois, dans les années 1206 et 1472, qu'il y avait au territoire des Moreines de la paroisse de MONS EN LAONNOIS une tombe nommée de Brunehault. Le premier porte "ad tumulum brunehaudis", le second "In territorio de Moreines sicut extenditur a via quae dicitur ad tumulum Brunehaudis" ; le troisième, un bois au chemin des vaches tenant au-dessoules de la tombe de Brunehaud.
On lit dans une autre charte sans date, mais plus ancienne que les précédentes :
"A Petra>Conchie per Crepidinem mondis usque ad tombam quae dicítur ad montem falconis". On Tapercevrait des remparts de la ville de LAON au XVIIIème siècle.
Les tumulus dans le département de l'Aisne ont une nature non comparable les uns des autres suivant leur situation géographique et leur configuration a donné lieu ã des explications diverses sur leurs origines protohistoriques, celtiques, autels et tombeaux et autres points stratégiques.
Assez souvent, on a rencontré dans ce genre de tumulus plusieurs galeries formant des chambres sépulcrales renfermant des individus couchés ou assis, quelquefois debout, la tête serrée contre des pierres ; des couloirs étroits conduisent à ces cryptes et semblent destinés au service commun de tous les caveaux. Des indices ordinaires peuvent apporter des marques d'une véritable antiquité, et actuellement on sait que la butte ou tombelle était véritablement un lieu d'inhumation qui consistait à élever une motte de terre de forme ronde, ovale, ou carrée, sur la dépouille du mort.
Dans le Laonnois se trouvent ou ont existé des tombelles, des buttes, et même des mottes féodales dans les communes de VOUEL, LANISCGURT, SINCENY, SAINT ELOI AUX FONTAINES (CØMMENCHCDN), VERSIGNY, MOY DE L'AISNE, CHAILLEVOIS, PENANCOURT, qui est une dépendance d'ANlÎZY, LA TOMBELLE près de MARLE, MONTESCOURT ET LÎZEROLLES, LA MOTTE FRESNAY, dans un jardin de la commune de CLASTRES, PONTRU, et enfin à ETREILLY, entre le village et le hameau d'ATTILLY.
Le terme de "buttes" doit être réservé aux tertres artificiels élevés pour la célébration du culte ; ils ont tous en général de dix à quinze mètres de hauteur ; tandis que celui de "tombelles" doit désigner les petits tumulus uniques par cimetières ayant succédé à l’époque marnière aux tumulus individuels de Hallstatt d'une hauteur de 2,60 m environ.
La hauteur avant la fouille de 1816 par le Chevalier de Boufflers correspond bien à la description d'une butte dont j’ai effectué les relevés d'après les documents déposés aux Archives Départementales de l'Aisne dans la série J du fonds du génie militaire IBJ17, 3J18 du 8 Juillet 1879, donnant une hauteur de 10 mètres pour une circonférence de 110 mètres et un diamètre de 35 mètres. Pour revenir à la fouille du Chevalier de Boufflers, il ne trouva que quelques monnaies romaines et enleva le sommet sur une hauteur de 2 mètres et fit une cuvette existant encore aujourd'hui. D'ailleurs, M. PIETTE cite comme monument celtique la Butte de LANISCOURT. Et il insiste sur le fait de découvertes fréquentes dans les environs de débris gallo-romains.
LEGENDE
Maintenant, on peut parler de la légende de la reine Brunehault qui a donné son nom à cette butte, et 1'on comprend le pourquoi des deux situations géographiques de la tombe de Brunehaut et de la Butte Brunehaut. Et là, je laisse 1'intervention qu'a faite M. Jacques MONTEGNIES dans la "Gazette de Mons" de 1985 et 1986, dont il a trouvé les documents à la Bibliothèque Municipale de LAON, Et il va même la faire revivre par une interview flash de la Reine Brunehaut.
L'INTERVIEW FLASH DE LA REINE BRUNEHAUT (+ 613) par Jacques MQNTEGNIESS.
- Le nom de BRUNEHAUT restera à jamais dans nos mémoires grâce à l’emplacement de votre tombeau (disons motte funéraire) situé sur la montagne des Creuttes ; mais vous êtes aussi célèbre pour avoir laissé dans notre région Nord-Picardie votre nom aux fameuses "chaussées BRUNEHAUT".
- En réalité, je n'ai été que l'instigatrice de la remise en état des nombreuses "voies romaines" (rendons à Cesar ce qui...) dom; huit des plus importantes partaient de BAVAY.
- C'est quand même grâce à vous que l'on trouve encore sur nos cartes actuelles ces étonnantes lignes droites, souvent simples sentiers, mais quelquefois devenues départementales ou nationales.
On se souvient également de la terrible et sanglante bataille de LEUCOFAO (LAFFAUX) Contre la Reine FREDEGONDE.
- Oui, mais j'y fus battue par mon ennemie héréditaire, la tristement célèbre reine sanguinaire, par celle qui fit assassine avant et au cours de son règne, par les procédés les plus perfides, les deux précédentes épouses de son mari (la deuxième était ma soeur), les fils héritiers, mon époux SIGEBERT, roi d'AUSTRASIE (je fus veuve à 28 ans) ainsi que 1'évêque qui bénit notre union !... la liste de ses crimes serait trop longue à énumérer ici.
- Il y avait donc deux reines à l'époque mérovingienne ?
* Et deux pays 2 la NEUSTRIE, et l'AUSTRASIE. FREDEGONDE était reine de la NEUSTRIE. La frontière n'était pas loin de la montagne des CREUTTES et d'ici ce n'é-taie-nt que petites collines entourées d'immenses et dangereux marécages.
FREDEGONDE mourut d'ailleurs peu de temps après en laissant la NEUSTRIE ruinée et l’ensemble du royaume livré à l’anarchie et à la barbarie. Par contre, le Laonnois, qui faisait partie du Royaume de SOISSONS (la NEUSTRIE) passa dans celui de TAUSTRASIE et je fis de LAON la capitale de 1'AUSTRASIE… qui devint ensuite première capitale des royaumes FRANCS (NEUSTRIE + AUSTRASIE) après mon tragique assassinat par le roi de NEUSTRIE, CLOTAIRE XI (père du futur roi DAGGBERT), le propre fils de FREDEGONDE !
-Votre horrible mort est relatés dans tous les manuels d'histoire, mais toujours en très peu de lignes, pourriez-vous nous en dire plus, si ce n'est pas trop vous tourmenter ?
- Si vous y tenez, mais ce n'est pas très réjouissant !
- J'aimerais aussi vous entretenir de votre beauté légendaire. C'est d'accord ?
D'abord, pourquoi cette condamnation, vous qui étiez la reine bien aimée de tous ?
- J'avais compris que le drame des dynasties, génératrices de tant de guerres, de massacres, venait de la TRADITION du PARTAGE.
- Et à chaque mort d’un roi, on "taillait en pièces", si j'ose dire !
- Bien sûr, d'où ces multiples royaumes francs. Et en faisant proclamer le DROIT D’AINESSE, LAON peut devenir ce que vous avez appelé par la suite, la première capitale de la FRANCE (des royaumes francs réunis).
- C'était en fait la manifestation d'une intelligence politique d'avant-garde.
- Mais il est dangereux d'être en avance sur son temps, et CLOTAIRE II, le fils de FREDEGONDE (rappelez-vous, mon ennemie héréditaire) réussit à constituer une armée avec la complicité des grands d'AUSTRASIE et à me livrer aux bourreaux.
- 0n peut parler d'une vengeance posthume de FREDEGONDE !
- D'autant plus que c4est par un simulacre de jugement que j'ai été accusée de la mort de dix personnes (en fait d'anciennes victimes de FREDEGONDE la sanguinaire).
Pendant trois jours, je fus torturée, puis laissée toute pantelante sur le dos d'un chameau et promenée à travers la région et livrée à tous les "insultes et tourments" de la foule des soldats.
- Et la célèbre scène du cheval emballé, dans tout cela ?
- Attendez, il faut donc en finir, l'on m'attacha alors par la chevelure, un pied et une main, à la queue d’un cheval "vicieux" (indompté). Au galop, me traînant au milieu des roches et des buissons, il ne resta de moi qu'une masse informe, une bouillie de chairs, d'os et de sang, que l'on jeta ensuite sur un bûcher, et mes cendres furent enterrées dans l'église d'AU'I'UN.
- Mais alors, votre tombeau, ici sur la montagne des CREUTTES ?
- Ce que beaucoup d'historiens ignorent, c'est qu'en 1632 (bien longtemps après ma mort) NICOIAS DE CASTILLE, abbé de SAINT MARTIN, fit ouvrir le tombeau, trouva le coffre et le fit enfouir suffisamment profondément sous grande motte ou nous sommes afin que l'on respecte à jamais mon repos éternel.
- Comment se presente ce coffre ?
- Il s'agit en fait d’un coffre de plomb contenant quelques ossements, un peu de charbon, et une molette d'éperon.
- Apres tous massacres et vengeances atroces, souvent entre membres d'une même famille, les gens mal intentionnés (dont je fais peut-être partie) ont tendance à dire LAON première capitale de la BARBARIE. Qu'en pensez-vous ? Etiez-vous personnellement bonne chrétienne ?
- Le récit suivant vous le confirmera :
Je vous ai relaté comment CLOTAIRE II, fils de FREDEGONDE (royaume de NEUSTRIE, capitale SOISSONS), me livra aux bourreaux. Comme vous le savez déjà, celle-ci n'avait jamais cessé, toute sa vie, de me poursuivre de sa haine. Or, un jour, elle me dépêche un assassin. L'homme se fait prendre. En signe de tolérance, je le renvoie à FREDEGØNDE. Malheureusement, celle-ci, mortifiée sans doute, se console en faisant couper les pieds et les mains du maladroit !
On ne parlera jamais assez de la barbarie gratuite de 1'époque ; par exemple, savez-vous qu'ä la cour de SOISSONS, on obligeait (à titre de divertissement) les esclaves à éteindre des torches de résine entre leurs jambes nues, jusqu’à ce qu'on voie les os de leurs cuisses. C'était un ministre qui avait eu cette idée amusante.
- Assez maintenant de ces horreurs et parlons un peu de votre beauté, tout aussi légendaire bien que moins connue que votre supplice.
- Il faut dire auparavant que j'étais la fille du puissant ATHANAGHILD, roi des GOTHS établi en ESPAGNE, et que je suis venue d'Espagne (un voyage interminable à l’époque) pour me marier avec CHILDERIC II (roi D’AUSTRASIE, Capitale LAON).
L'étrangère que j'étais n'a pas manqué de susciter de nombreuses jalousies. Et pourtant, disent les témoins de ce voyage, "... on a pu admirer la grâce de ses manières, les charmes de son visage, et l'agrément de son discours..."
- Un certain FORTUNATUS, ministre, qui se piquait de poésie, n'a-t-il pas fait par la suite votre éloge, sous forme de poème chanté ?
- C'est vrai, je n'ose vous le traduire...
- "O vierge que j’admire et qu'adorera ton époux ! Brunehaut, plus brillante, plus radieuse que la lampe éthérée, le feu des pierreries cède à l'éc1at de ton visage ; tu es une autre Vénus et ta dot est l'empire de ta beauté... La blancheur du lait et le rouge le plus vif sont les couleurs de ton teint ; les lys mêlés aux roses, la pourpre tissue avec 1'or, n'offrent rien qui leur soit comparable et se retirent du combat. Le saphir, le diamant, le cristal, l’émeraude et le jaspe sont vaincus, l'Espagne a mis au monde une pierre nouvelle.
Au bois Fouquart, territoire de MONTBAVIN, il y a une chaussée de Brunehaut dont on voit très bien la relation entre la butte, la reine Brunehaut et la restauration de toutes ces chaussées. Donc la butte utilisée comme point d'observation pour la réfection de toutes ces voies, qui étaient auparavant romaines, et d'autres considérées encore comme chemins gaulois.
RESTAURATION
Pourquoi la restauration de cette butte ?
Avec de la persévérance dans les recherches et les trouvailles, on parvient à mieux apprécier les faits authentiques du temps que nous venons de remonter et qui dans l'espace n'est pas si lointain que cela, alors respectons et aidons ce patrimoine culturel à rester ce qu'il doit être dans sa configuration originale pour nos futures générations d'hommes.
Pour la réfection complète de la butte, il faut avant tout retirer avec précaution les arbres se trouvant sur la butte ; déboiser entièrement le site et son alentour sur un diamètre de 80 mètres ; remettre en place les terres retirées au XIXème siècle par la fouille du Chevalier de Boufflers, et semer de la pelouse sur 1'étendue afin de redonner le coup d'oei1 nécessaire au prestige historique et archéologique de notre patrimoine.
Mais pour cela, il est essentiel d'obtenir 1'autorisation des propriétaires de ce terrain situé sur LANISCOURT et appartenant à la famille STAUMOND.
Le Syndicat d'initiative du Canton d'ANIZY, dont le Président, M.DEMETZ, propose une aide financière et de la main d'oeuvre ; les maires des communes environnantes suivent la même idée pour la protection et l’utilisation durable en tant que lieu touristique, et je prévois une table d'orientation pour le promeneur.
En projet, la demande de protection de la butte de LANISCOURT par 1'Administration compétente (Direction Régionale des Antiquités Historiques de Picardie).
J. L. GIRARD